L'ampoule.

« Ne recherchez pas la connaissance pour elle-même. Tout ce qui ne procède pas directement de l’émotion est, en poésie, de valeur nulle »

(M. Houellebecq – Rester vivant)


Tu allumes. Éteins. Apparais. Disparais.

Et t’éloignes devant les dernières lueurs de l’ampoule.

Pars. Ferme tout à clé. Et laisse-leur

Permets aux ténèbres d’entrer dans la pièce.


Sous mon globe de verre, en retrait de la scène,

De ma haute loge, j’ai renoncé à briller.

Deavant ce spectacle, je ne pouvais que me taire.

Et désirer, les circuits hérissés, ton retour.


Pourtant quand les claquements de tes pas sur le

Carrelage et celui de l’interrupteur ont résoné

Très vite, en courant, j’ai voulu te rejoindre

Mais je n’en avais plus, perdu mon culot inné !

Freinée ma vitesse, par une simple pression !

Le commutateur m’a voué à l’inaction.


La nuit tombant, j’ai sollicité mes lumières

Pour faire brûler les cierges de la mémoire

Et dans le vacarme du silence, dans le noir

Un petit goût amer se répandit


Celui d’avoir commencé sa vie à la fin

Enterré dans le charnier d’une caisse fermée

Puis exhumé dans les allées du magasin

Dans le but avouable de faire acheter


De la boite au rais du soleil, mon modèle

Je me suis senti soulevé par une force étrangère

Jusqu’au lampadaire où j’ai été fixé

Avec une mission : illuminer la salle à manger.


Clair/obscur. Jour/Nuit. Candide/sinistre

Je te vois, tu ne me vois pas. Je suis là mais

Tu l’as oublié. Je suis transparent. C’est vrai.

Mais voir tout ce monde défiler ne me rend pas triste.


Un paparazzi aux flashs crépitant

Qui, sans rien chercher, arrive à tout savoir

Un témoin lumineux qui guide le fleuve de tes âges

Le sable brillant dans lequel se blottit le temps


La présence qui sublimerait tes rires

Et le phare qui te donnerait espoir lorsque

Une mer de tristesse se formerait au creux de tes yeux

Mais je ne suis qu’une lampe sans génie


Vouloir et être. Attention à la frontière !

Ont gémi mes branchements rougissant sous l’effet

D’un court-circuit soudain et sournois

D’un coup de foudre qui m’a électrisé

Ils n’ont pas voulu me laisser m’attacher à toi

Ils ont dit que c’était la pire faute à commettre

Et ma condition m’a été rappelé par une paroi de verre


Mon halo fulgurant a volé en petits éclats

Mes plates intentions sont devenues platoniques, honte courtoise

Et tu cours, toi , quelque part où je ne suis pas, dans le monde

Que suis-je ? Mes rayons se mutent en pénombre …


Ma vie ne tenait qu’à un fil tortillé. Il s’est oxydé

Avec le retard propre à l’allumage, on a essayé de m’aider

Vains les caresses du néon et les éléctrochocs d’halogène

Et sous ma bulle vitrifiée, flotte mon âme de Tungstène

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